Au confessionnal

Mon père, je m’accuse
D’avoir eu des pensées impures

Mon père, je m’accuse
D’avoir pensé au corps de l’homme
En prenant en bouche le corps du Christ

Mon père, je m’accuse
D’avoir caché des cartes postales coquines
Dans mon missel

Mon père, je m’accuse
De m’être touché les parties honteuses
Avec les gants blancs que je porte à la messe

Mon père, je m’accuse
D’avoir essayé de voir
Sous le pagne du Christ en croix

Mon père, je m’accuse
D’avoir ajouté des mots obscènes
En chantant les cantiques

Mon père, je m’accuse
D’avoir rincé ma chatte dans le bénitier

Mon père, je m’accuse
D’avoir fourré mon chapelet dans mon cul
Et de l’avoir retiré grain par grain
En soupirant d’aise

Mon père, je m’accuse
D’avoir joué avec les cierges
Ce qui leur donne cette drôle d’odeur
Quand ils brûlent

Mon père, je m’accuse
D’avoir usé la patine du maître-autel
En y frottant mon abricot

Mon père, je m’accuse
D’avoir sous sa soutane décalotté
Monseigneur pendant qu’il rajustait sa calotte

Mon père, je m’accuse
De m’être crossée avec sa crosse

Mon père, je m’accuse
D’avoir la gougnotté la noune de la nonne

Mon père, je m’accuse
D’avoir blasphémé l’immaculée conception
En souillant ma vertu dans la nef sans contraception

Mon père, je m’accuse
D’avoir pissé dans le ciboire
Pour que vous en preniez
Et que vous en mangiez tous

Mon père, je m’accuse
D’avoir caché mon kotex dans le calice
Car ceci est mon sang, livré pour vous

Prière de la pornographe

Sainte Marguerite de Cortone<
Patronne des prostituées
Toi qui t’abandonnas toute entière
Aux exigences impétueuses de la chair,
Toi qui connus toutes les joies sublimes
Et foudroyantes de la débauche,
Toi qui fus vierge, mère, maîtresse, mystique, putain et stigmatisée
Toi qui te fis refuser le voile parce que tu étais trop belle
Toi qui trouvas ton amant assassiné au pied d’un arbre
Fais que je sois toujours pleine de désir

Sainte Marguerite de Cortone
Patronne des écrivaines érotiques
Toi qui, pour racheter tes errements, fis pénitence publique
En te promenant dans les rues, montée par un ânier
Qui dans les rues criait ton passé en n’omettant
Aucune impudeur, aucune obscénité
Apprenant ainsi aux bourgeois effarés
Une multitude de péchés délectables
Qu’ils n’auraient jamais eu la liberté
Ou même l’imagination de commettre
Fais que je puisse toujours crier mon désir

Amen

Je veux lire

Léo
Léa
Léo et Léa
Le camion de Léo et Léa
La radio de Léo et Léa
Léa est l’amie de Léo
Léo est l’ami de Léa
Léa a la balle et le bâton de Léo
Léo a la poupée et la bicyclette de Léa
Léo a pelé la poire
Léa boit du lait
Léo et Léa ont lu le livre
La petite Léa a un tutu rose
Léa a la peau humide
Léo regarde Léa
Léa a le souffle court et rapide
Léo goûte la peau de Léa
La petite Léa a une jolie culotte
Léa caresse son minou
Le minou de Léa est une jolie petite bête
Les soupirs de Léa sont humides
Léo dépasse de son slip
Léo est bandé comme papa
Léo lèche le minou mouillé
Léa ouvre ses jambes et gigote l’index dans son anus
Léo suce les seins de Léa pendant qu’elle le branle et guide sa queue vers sa fente et puis Léo qui la pénètre d’un coup pendant qu’elle crie qu’il la met de plus en plus vite avec des clapotis visqueux plus qu’elle brame encore et oh oui et plus fort et plus profond et qu’il mord ses lèvres elle agite les jambes crispe les orteils et les ongles sur la peau de Léo et après elle jouit en hurlant et qu’il vient sur son ventre
Sur sa poitrine
Son menton
Son nez
Le nez de Léa
La bouche de Léo
La bouche et le nez de Léa
Léo
Léa

Précisions

Avec tes lèvres sur les miennes
Avec ta langue qui frôle mes dents
Avec la même qui plus tard glisse sur ma raie
Avec cet anneau doré sur tes nymphes
Avec tes cheveux noirs comme tes intentions
Avec ta peau secrète gravée de signes cryptiques
Avec ta culotte rouge qui flotte dans ma baignoire
Avec tes fesses comme des miches dorées dans mes mains
Avec tes fesses zébrées de rouge sous la jupe de tweed
Avec ton haleine sucrée de femme éthylique
Avec tes larges cuisses reptiliennes autour de mes hanches
Avec mes orteils doucement caressés par ta salive
Avec ta rivière de perles sur la table de nuit
Avec cette cicatrice violacée sur ton pubis
Avec la rosace tendre et sauvagine de ton cul
Avec les vergetures et les plis flasques de ton ventre
Avec ta logorrhée logarithmique quand je te lèche
Avec tes messages sibyllins sur le répondeur quand je te laisse
Avec ce sourire de starlette de porno moyen-oriental
Avec tes deux doigts qui butent contre ma matrice
Avec cette laisse et ce collier à clous autour de ton cou

Supplique textée après minuit

Assez, je ne veux plus rien entendre
Je me fous des yeux noirs de ton fiancé de Vancouver
Rien à foutre que tu l’aies dans la peau, ce con
Épargne-moi les détails sur sa bite moisie

Ne me raconte pas les autobus, les gares, les trains
L’autostop les camionneurs aux aisselles de poulet frit
Tous les fuseaux horaires les frontières déflorées
Pour passer un jour de plus en son odieuse compagnie

Ni le grand lit de son loft de Yaletown
Où vous avez copulé comme des chiens sans collier
Et mangé des gaufres avec de la crème fouettée
Tu vas finir par me faire vomir sur le combiné

Épargne-moi tes pleurnicheries je sais je sais je sais
Que tu ne l’as pas vu depuis la Chandeleur ou la Trinité
Qu’il a des fesses à faire mourir un sourire à faire renaître
Dis-moi plutôt : t’aime-t-il vraiment, cet enfant de salaud ?

Irait-il jusqu’à boire le sang qui s’écoule de ton calce odorant
Quand la lune te transforme en femelle hululante ?
Irait-il jusqu’à gratter du bout de la langue les sombres épices
Séchées sur le vortex hypnotique de ton anus astral ?

Moi, oui

Car je ne suis pas un jeune homme bien qu’on présente à sa mère
Je suis la catin invertie la chipie dégénérée hystérique
La tribade vénéneuse qui attend dans l’ombre immémoriale
Le moment propice pour aspirer par ton sexe le miel de ton âme

Irait- il jusqu’à offrir son cul à ta sainte main thaumaturge
Pour que tu puisses jusqu’au poignet voir s’il a du cœur au ventre ?
Irait-il jusqu’à oindre tes pieds sublimes de ses sucs
Les essuyer avec ses cheveux pour te bénir, toi, femme christique ?

Moi, oui

Il est des offrandes terrifiantes, nécessaires, mais hors de portée
De ton petit monsieur propret gominé au sourire fluoré
Avec son phallus couvert de poussière de missel
Et de smegma puant le saint chrême des valeurs familiales

Lorsqu’il te délaissera pour ses copains de poker
Lorsqu’il se dira trop vieux pour embrasser ta fente
Lorsqu’il bandera mou à la vue de tes rides sublimes
Lorsqu’il préféra la télé à ta vulve angélique et bestiale

Donne-moi un coup de fil
Je te susurrai les horreurs que tu adores
Donne-moi un coup de fil
Je te murmurai les mots que tu veux entendre

Ou alors, laisse-moi un message bien vulgaire et bien tendre
Pour que je devine au premier souffle que c’est bien toi

Je t’appelle Tony

Parce que je ne connais pas ton prénom
Et que je ne pige foutre rien
À ce que profère ta gueule anguleuse
D’ange italo-canadian du West Island

Je t’ai avalé avec gourmandise
Le foutre crémeux au fond de la gorge
Conclusion prévisible d’une tragicomédie
Commencée à la foire alimentaire

Seigneur pardonne-moi
Car je savais ce que je faisais
Dès que j’eus fait glisser ton caleçon
Le long de tes mollets mignons

Tes yeux fermés les traits contractés
Et ta queue bouffie que je bouffai
En lieu et place du six-pouces italien
Acheté comme encas chez Subway

C’est décidé je te ramène à la maison
Tu es mon ourson de peluche frisé
Gagné au stand de tir de la foire
Car n’avale pas ce lait qui veut

Ta copine ? Peu m’en chaut qu’elle t’attende chez toi
Au chaud près du four — viens plutôt fourrer
Où j’habite, mettre ta bite, ta pine
Ton manche au creux de ma tendre twat

Tu es à moi maintenant entre mes cuisses
Ta langue sur mes seins pommes caramel
Quelle aille se faire mettre par Lucifer
Lécher des moules marinières au Carmel

Je t’appelle Tony parce que je connais trop
De Stéphane, de Patrick et de François
Je ne connais pas ton prénom,Tony
Mais je connais ton visage et ton image

Gravée dans ma mémoire comme le moment
Où grave et tremblant tu te crispas et flua
Renversé, un peu de mâles fluides sur ton ventre
Aux six collines collantes et broussailleuses

Tu me sembles si sûr de toi, ce sexe sucé
Semble si safe, tu sens si bon l’espresso
Le panettone et le savon Irish Spring
Tu es un oisillon fraîchement tombé de ton nid
Que je ne peux appeler autrement que Tony

Message vocal

Anne, c’est encore moi
Je t’en prie, si tu es là, décroche
Il faut que je te le dise
Je dois le raconter à quelqu’un
Mario Bodard veut me prendre par derrière

Il est si insistant
Que je lui ai donné mon numéro
Mais maintenant je regrette
Dieu que je regrette
Car jour et nuit il m’appelle pour laisser
Sur mon répondeur de propos orduriers
« Quand pourrai-je enfin t’embrocher ? »
« Je veux te sucer la pine, joli cœur »
« Viens gruger ma viande jusqu’à l’os »
Anne, il me fout la trouille
Car jamais n’ai-je été fourgonné
Par un garçon boucher

Anne, si tu savais, lorsqu’il m’appelle
Pour me dire qu’il veut
Bouffer mon trou de cul
Pour me dire qu’il bande comme un taureau
Qu’il astique son outil en pensant à moi
Qu’il crie mon nom en fourrant deux doigts
Dans son intérieur de ronde
Pour se vanter d’être un animal
Une bête de sexe
Je ne peux m’empêcher de penser
À son visage de bovidé
À ses mains larges et poilues
À la moiteur de ses naseaux
Quand derrière le comptoir
Il enveloppe en souriant mes escalopes

Mario Bodard veut mon cul
Il dit qu’il peut pistonner des heures durant
Comme une enfileuse à saucisses électrique
Si seulement je pouvais décrocher le téléphone
Si seulement je pouvais lui dire « oui »
Il me prendrait là, sur son bloc à découper
Il me retournerait sur sa planche à enculer

Mais je ne retourne pas ses appels
Je ne suis pas celui qu’il croit
Pas question de le laisser lécher mes amourettes
Pas question de le laisser fourrer mon andouille
Pas question de le laisser attendrir mon aloyau

Devrais-je faire retracer ses appels ?
Devrais-je changer de numéro ?
Devrais-je appeler les flics ?
Anne, je ne sais plus quoi penser
Je n’ose plus aller à la boucherie
Tâter les côtelettes et les saucissons
Samedi après-midi avec mon petit mari

Attends, je te rappelle
J’ai quelqu’un sur l’autre ligne

Rectitude politique

Cher collègue
Suite à notre dernier entretien
Je suis dans l’obligation de vous informer
Que je n’ai jamais eu à votre égard
La moindre pensée déplacée

Je veux que vous sachiez
Que je n’ai jamais envisagé de m’accoupler avec vous
Que je n’ai jamais eu le moindre béguin
Ni aucune envie irraisonnée de vous épouser
Et que l’idée de vous offrir des fleurs
Ou de glisser dans le tiroir du haut de votre classeur
Ma culotte ornée de mon prénom
Et de mon numéro de téléphone
Ne m’a jamais traversé l’esprit

Je vous assure que je n’ai jamais souhaité
Vous embrasser ou caresser vos charmantes mèches noires
(Je dis charmantes pour être polie
Et non pour exprimer
La moindre attirance envers vous)
Parce que vous savez aussi bien que moi
Que mon éthique professionnelle m’empêche
De vous imaginer sans votre chemise

Vous êtes un collègue
Et aucun collègue au torse glabre
Ne hante mes fantasmes
Ce n’est qu’une simple question de déontologie

Vous devez donc être conscient
Qu’il ne m’arrive jamais de me demander
Quelle est la taille de votre verge
Et encore moins d’essayer de deviner
Si vous êtes circoncis ou non
Il est clair que cela ne me regarde pas

C’est d’ailleurs pour cette raison
Que je n’ai jamais contemplé votre derrière
Lorsque vous marchez devant moi
Même si vous l’agitez de façon si suggestive

Mieux : je n’ai jamais eu envie
De vous voir gambader dans l’herbe folle
Sous le soleil de juillet
Avec pour seul vêtement
Une paire de chaussettes blanches
Qui donc aurait des envies aussi ridicules ?
Certainement pas moi
Je peux vous en assurer

Je vous prie donc de croire
Que je n’ai jamais eu envie
De me jeter dans vos bras
Que je n’ai jamais espéré
Votre bite dans ma chatte
Ou sur mes lèvres
Ni votre langue sur mon clito

Ce n’est pas parce que j’aime
Ficeler et bâillonner les hommes
Que je rêve de vous voir à ma merci
Ce n’est pas parce que
J’aime lécher de la crème glacée
Sur le cul de mes amants
Que je rêve de vous enduire
De gelato praline et beurre
Ou que je rêve de verser de la cire brûlante
Sur votre gland pour pouvoir
En apaiser le feu avec ma salive

Je ne pense pas à vous
Lorsque je me caresse le soir
Seule dans mon lit
Je n’ai jamais prononcé votre prénom
Lorsque mes doigts s’insinuent
Entre les lèvres humides de mon sexe
Je ne m’imagine jamais
Assise sur le photocopieur
Pendant que vous me fourgonnez
En immortalisant notre union
Sur du papier format légal
Je ne vous imagine jamais
Étendu sur votre bureau
Auréolé de post-it
Le visage transfiguré par l’orgasme
Pendant que vous vous répandez dans ma bouche
Je n’ai jamais imaginé
Le laveur de vitres dans sa nacelle
Nous espionnant en s’astiquant le manche
Pendant que vous me prenez en levrette
Sur la grande table de la salle de réunion
Je ne pense jamais
À vos épaules larges
À vos bras puissants
Me basculant sur les sacs de courrier interne
Pour me saillir avec vigueur et passion

Je ne pense pas à vous lorsque je jouis
En fait, je ne pense jamais à vous
Hors des heures de travail réglementaires
Définies par notre convention collective

En espérant
Que tous les malentendus
Seront ainsi dissipés
Je vous prie de croire
Cher collègue
En l’expression
De mes sentiments
Distingués

Sous mon bureau

Personne ne t’avait vu te glisser
Sous mon bureau

Personne ne pouvait t’entendre
Sous mon bureau

Mais moi, je pouvais sentir ta présence
Sous mon bureau

Tu as écarté lentement mes genoux
Sous mon bureau

Tu as fait mouiller mon sexe
Sous mon bureau

Tu as chuchoté des mots indécents
Sous mon bureau

Tu as doigté ma fente
Sous mon bureau

Tu y as enfoncé quatre doigts
Sous mon bureau

Tu as lapé mon plaisir
Sous mon bureau

Tu as mordu mon âme
Sous mon bureau

Je t’ai rejoint en tremblant
Sous mon bureau

Émue, je t’ai offert d’être promu
Sous mon bureau

Même si je suis trois paliers hiérarchiques
Sous ton bureau